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Aucun délai n’est opposable au contribuable pour saisir les juridictions en cas de rejet implicite de sa réclamation contentieuse

Par un avis du 21 octobre 2020, le Conseil d’État vient d’apporter une clarification particulièrement attendue des contribuables et des praticiens en matière de procédure fiscale.

Les dispositions de l’article R 199-1 du Livre des Procédures Fiscales prévoient que le contribuable peut introduire une action devant le tribunal compétent dans un délai de deux mois à partir du jour de la réception de l’avis par lequel l’administration notifie la décision prise sur sa réclamation contentieuse. Par ailleurs, le contribuable qui n’a pas reçu la décision de l’administration dans un délai de six mois peut saisir le tribunal dès l’expiration de ce délai.

Le Conseil d’état s’était déjà penché sur la question de savoir si les décisions de rejet irrégulièrement notifiées au contribuable pouvaient être contestées indéfiniment.

Par un arrêt du 31 mars 2017 (CE Sect. 31/03/2017, Min c/A, n°389842), le Conseil d’État avait transposé au contentieux fiscal les principes dégagés dans sa décision CZABAJ du 13 juillet 2016 (CE 13/07/2016, CAZBAJ, n°387763).

Il avait jugé que « le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l’effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d’une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. Dans le cas où le recours juridictionnel doit obligatoirement être précédé d’un recours administratif, celui-ci doit être exercé, comme doit l’être le recours juridictionnel, dans un délai raisonnable. Le recours administratif préalable doit être présenté dans le délai prévu par les articles R 196-1 ou R 196-2 du LPF, prolongé, sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le contribuable, d’un an. Dans cette hypothèse, le délai de réclamation court à compter de l’année au cours de laquelle il est établi que le contribuable a eu connaissance de l’existence de l’imposition. »

Mais cette affaire ne se prêtait pas à répondre à la question qui revêtait en pratique le plus d’incertitude : celle de savoir si les recours consécutifs à des décisions de rejet implicites se trouvaient également concernés par le principe du délai raisonnable d’introduction du recours juridictionnel.

L’enjeu était de taille car, bien souvent, l’administration fiscale n’apporte pas de réponse au contribuable particulièrement en cas de contentieux de place (ex : taxe de 3%…).

L’avis du 21 octobre 2020 du Conseil d’Etat vient répondre à cette incertitude et précise qu’en l’absence de décision expresse de l’administration, aucune forclusion n’est opposable au contribuable qui saisit le tribunal administratif plus d’un an après le rejet implicite de sa réclamation contentieuse.

Il a en effet jugé qu’il « résulte des dispositions de l’article R. 199-1 du livre des procédures fiscales que seule la notification au contribuable d’une décision expresse de rejet de sa réclamation assortie de la mention des voies et délais de recours a pour effet de faire courir le délai de deux mois qui lui est imparti pour saisir le tribunal administratif du litige qui l’oppose à l’administration fiscale, l’absence d’une telle mention lui permettant de saisir le tribunal dans un délai ne pouvant, sauf circonstance exceptionnelle, excéder un an à compter de la date à laquelle il a eu connaissance de la décision. En revanche si, en cas de silence gardé par l’administration sur la réclamation, le contribuable peut soumettre le litige au tribunal administratif à l’issue d’un délai de six mois, aucun délai de recours contentieux ne peut courir à son encontre, tant qu’une décision expresse de rejet de sa réclamation ne lui a pas été régulièrement notifiée ».

Dans la recherche du compromis entre légalité et stabilité des situations consolidées par l’effet du temps, les magistrats du Conseil d’État ont clairement fait le choix de la légalité et ont rendu un avis particulièrement favorable aux contribuables qui pourront toujours attaquer, y compris de nombreuses années après le dépôt de leur réclamation contentieuse, le silence de l’administration fiscale.

Loïc Broise

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4/11/2020