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Redevances domaniales versées par les personnes morales de droit public : Non assujettissement à la TVA faute de concurrence dans ce secteur

Par une réponse ministérielle en date du 30 décembre 2021, le Ministre de l’économie, des finances et de la relance prend position sur le non assujettissement à la TVA des redevances domaniales perçues par les personnes morales de droit public en contrepartie de l’occupation de leur domaine public, pour la réalisation d’activités économiques (terrasses de bars par exemple).

Après avoir précisé que, selon la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), la mise à disposition de biens immobiliers sur le domaine public doit s’analyser comme une activité économique (CJUE 4/10/2001, C 326/99, Goed Wonen), le ministre rappelle toutefois les dispositions de l’article 13 de la Directive TVA, transposées en droit interne sous l’article 256 B du Code Général des Impôts, lesquelles doivent conduire, selon une jurisprudence constante de la CJUE, au non-assujettissement des personnes morales de droit public si les deux conditions suivantes sont réunies :

  • l’activité doit être exercée par un organisme agissant en tant qu’autorité publique et ;
  • le non-assujettissement ne doit pas conduire à des distorsions de concurrence d’une certaine importance.

Le fait d’agir en tant qu’autorité publique relève de la casuistique. D’une manière générale, s’il est démontré que l’autorité publique dispose, dans le cadre de son contrat, de pouvoir exorbitant de droit commun qui serait par exemple de nature à priver le concessionnaire de la possibilité de s’opposer aux décisions du concédant ou à réclamer une indemnité en cas d’interruption totale ou partielle résultant de mesures temporaires de police prises par l’autorité concédante, la première condition pourrait être considérée comme étant remplie.

La situation semble en revanche différente en présence d’un contrat accordant au bénéficiaire des droits réels (i.e. Bail Emphytéotique Administratif) et lui permettant de se comporter comme un propriétaire.

En ce qui concerne la notion de distorsion de concurrence, l’Administration adopte une position en accord avec la position de la CJUE dans l’arrêt « National Roads Authority » du 19 janvier 2017 (C-344/15). Elle considère en effet que la possibilité pour un opérateur privé d’entrer en concurrence doit être réelle et non simplement théorique.

Partant de cette analyse, et dans la mesure où seules les personnes morales de droit public sont autorisées à mettre à disposition de tiers le domaine public, elles ne peuvent pas donc pas venir être concurrencées par le secteur privé : la réponse ministérielle précitée rappelle que « seules les personnes morales de droit public peuvent accorder des autorisations d’occupation privative du domaine public. Partant, elles ne se trouvent pas en concurrence avec les opérateurs privés ».

Les conséquences ne sont pas neutres pour les collectivités qui ne pourront pas, en cas de non-assujettissement des redevances domaniales à la TVA, voter le budget des investissements en hors taxe et, devront ainsi financer la TVA, laquelle devrait néanmoins pouvoir, mais sous certaines conditions, être récupérée (en grande partie) par le jeu du FCTVA.

 

Question écrite de Jean Louis Masson, n° 24241, JO du Sénat du 30 décembre

 

Jérôme Lacourt

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