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L’administration fiscale commente la réforme du régime des monuments historiques et livre une définition contestable de la surface habitable

Le régime fiscal des monuments historiques prévu aux articles 156 et 156 bis du Code général des impôts (CGI) est un régime dérogatoire qui permet notamment aux contribuables soumis à l’impôt sur le revenu d’imputer sur leur revenu global, sous certaines conditions, les charges de propriété foncières déductibles des revenus fonciers en vertu de l’article 31 du CGI.

Ce régime relativement ancien a été défini pour la première fois en 1964 puis complété en 1976. Il a depuis subi de nombreuses modifications, notamment suite à l’adoption de la loi de finances pour 2009 qui, en vue de lutter contre les défiscalisations dites sauvages, a institué une procédure d’agrément pour bénéficier de ce régime lorsque le bâtiment, classé ou inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques, fait l’objet d’une mise en copropriété.

La loi de finances rectificative pour 2014 a modifié la procédure d’obtention de cet agrément en ajoutant une condition tenant à l’affectation du bâtiment à l’habitation, dans les deux ans qui suivent la demande d’agrément, pour au moins 75 % de ses surfaces habitables portées à la connaissance de l’administration fiscale. A cet égard, la loi précise que les immeubles ou fractions d’immeubles destinés à une exploitation à caractère commercial ou professionnel ne sont pas considérés comme affectés à l’habitation. La loi de finances rectificative pour 2017 a supprimé la procédure d’agrément tout en maintenant la condition relative à l’affectation à l’habitation pour au moins 75% des surfaces habitables. A noter que la mention « portées à la connaissance de l’administration fiscale » n’a pas été reprise.

L’administration fiscale a commenté les dispositions issues de la loi de finances rectificative pour 2014 et 2017 dans des BOI mise en ligne sur sa base BOFIP respectivement les 13 et 19 décembre 2018.

Selon ces commentaires (BOI-RFPI-SPEC-30-30-20181219 n°395), pour apprécier le respect de cette condition d’affectation à l’habitation pour au moins 75 % des surfaces habitables :

– les surfaces habitables, comprises au dénominateur, s’entendent des surfaces susceptibles d’être utilisées ou transformées en locaux d’habitation. Il s’agit, en pratique, des surfaces bâties couvertes ;

– les surfaces affectées à l’habitation, comprises au numérateur, s’entendent de toutes les surfaces et annexes y afférentes à usage d’habitat individuel ou collectif. À cet égard, les lieux de vie commune dans un habitat collectif sont également considérés comme affectés à l’habitation (par exemple, un réfectoire ou une salle de réunion à usage des personnes hébergées)“.

La règle pratique consistant à retenir les surfaces bâties couvertes est contestable tant elle s’écarte, à notre sens, de la notion de surface habitable telle que celle-ci résulte du rapport de la commission des finances (rapport n° 159 -2014-2015). Rappelons que selon ce rapport, la notion de surface habitable s’entend de la surface potentiellement habitable et non de la surface bâtie couverte.

Or la crainte est que l’administration généralise l’application de cette règle à toutes les situations et décide ainsi d’inclure au dénominateur l’ensemble des surfaces bâties couvertes même lorsque certaines surfaces d’un bâtiment ne peuvent pour des raisons juridiques ou techniques tenant aux caractéristiques architecturales du bâtiment être aménagées en logement.

On peut citer, par exemple, le cas d’une chapelle intégrée au bâti dont l’architecte des bâtiments de France impose le maintien de la vocation et qui ne peut donc pas être transformée en surface habitable. A l’extrême, l’interprétation ainsi retenue par l’administration pourrait conduire à devoir comprendre au dénominateur du rapport de surfaces un lavoir couvert inhabitable par principe.

Le champ d’application de ce régime censé encourager la restauration de bâtiments remarquables est potentiellement réduit par cette lecture de la loi.

On espère que par cet ajout l’administration a simplement souhaité simplifier, pour faire face à d’éventuelles difficultés opérationnelles, le calcul de la surface habitable dans la majorité des situations, sans pour autant avoir entendu prendre en compte des surfaces insusceptibles d’être affectées à l’habitation avant comme après la restauration de l’immeuble.

 

Jean-Baptiste LORILLON

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